Drogue, Blanchiment d’argent, Démocratie :
Les Etats-Unis d’Amérique sont très sensibles non seulement sur les questions de Drogue et de terrorisme, mais aussi à la gouvernance politique et économique et plus encore à tous les aspects de la démocratie. L’administration OBAMA n’attend pas que la situation pourrisse avant de prendre les taureaux par les cornes et de neutraliser toutes velléités. Le Togo est sans doute dans la ligne de mire de la Communauté internationale en matière de trafic de Drogue, de blanchiment d’argent et de refus de l’alternance. Cela a été signifié à plusieurs reprises et confirmé par la plainte déposée à New-York contre le pays de Faure Gnassingbé sur les trafics illicites. De hautes personnalités togolaises sont soupçonnées, le pays lui-même mérite une attention particulière et cela vaut un déplacement, celui de la secrétaire d’Etat, qui foule pour la première fois le sol togolais ce jour. Une visite qui annonce les couleurs des inquiétudes que nourrissent les USA vis-à-vis du Togo. Même si le maquillage diplomatique et politique qu’en font les autorités ne prend pas en compte le véritable objet de la visite : l’avertissement sur tous les plans….
Hilary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine est au Togo aujourd’hui mardi pour une visite éclair de quelques heures. L’annonce de la visite a sans doute fait paniquer le régime et donne lieu d’ores et déjà à une polémique sur son objet.
D’après plusieurs sources, cette visite se cadre diplomatiquement dans les relations qui unissent les deux pays, logique normal, et sur l’élection en fin d’année dernière du Togo au siège du Conseil non permanent des Nations Unies. S’il est vrai que le Togo n’a pas d’autres choix que de rester dans le peloton américain en ce qui concerne les votes sur les grandes questions comme celles de la Syrie et de l’Irak, il sera de bon ton que le président togolais et la Chef de la diplomatie américaine en débattent.
Mais, contrairement à la précipitation des autorités togolaises à défendre une intention pour Hillary Clinton d’apporter sa bénédiction au Togo sur des réformes entreprises, des questions importantes seront également à l’ordre du jour. Une visite de satisfecit ne se fait pas en une ou deux heures, encore moins de façon aussi aléatoire que celle-ci. Les Etats-Unis d’Amérique n’ont pas besoin d’envoyer Hillary Clinton au Togo avant de se prononcer sur les avancées en matière de démocratie. L’ambassadrice Patricia Hawkins, avant de dire ses adieux au Togo, a été suffisamment claire en ce qui concerne les avancées démocratiques de ce pays. Elle n’a pas manqué de dénoncer la corruption, la mauvaise gouvernance, les répressions des manifestations de l’opposition et les entraves faites par le pouvoir à l’alternance, gage de la Démocratie. Ce message qui n’est pas gratuit a suffisamment son sens. Et cela ne mérite pas un bouquet de fleurs d’Hillary Clinton à Faure Gnassingbé. D’ailleurs, le Togo, comme on le constate, n’est pas classé dans les priorités américaines. Il a donc fallu une occasion libérienne et une parenthèse ivoirienne pour Hillary Clinton pour faire un crochet dans ce pays afin de mettre en garde les autorités contre les revers constatés dans son fonctionnement.
La Drogue et le blanchiment d’argent seront évoqués.
Le gouvernement américain a engagé depuis 2005 un partenariat avec le gouvernement togolais sur la question de lutte contre le trafic de Drogue. Il est vrai, il y a quelques années, le Togo était la plaque tournante du trafic de la poudre blanche ; un trafic qui se menait en complicité avec les plus hautes autorités. L’arrivée de Faure Gnassingbé a certes permis d’atténuer les activités des seigneurs de la drogue, mais n’a point aboli les trafics pour lesquels les services anti-drogue des USA, à l’instar de la DEA (Office américain de lutte contre la drogue) ont été obligé de changer de méthode. En 2004, peu avant le décès du Général Eyadéma, un rapport commandité par le Chef de l’Etat lui-même mettait en cause des officiers supérieurs de l’armée, des magistrats de la justice et plusieurs corps militaires et civils. Rendu public en partie, ce rapport n’a jamais eu de suite et les personnes indiquées comme actrices et commanditaires dans le trafic de drogue circulent jusqu’alors librement.
C’est l’annonce de la plainte américaine à New York sur l’implication du Togo dans la protection des trafiquants de drogue et de blanchiment d’argent qui a encore attiré l’attention des autorités togolaises. Hillary Clinton aura donc la tâche de faire clarifier la position du Togo sur cette question.
Le blanchiment d’argent est un sport national au Togo. Même si la plainte introduite aux USA contre notre pays cite nommément des Libanais proches du Hezbollah qui opèrent à travers la vente des véhicules d’occasion, il n’est pas exclu que ces personnes bénéficient de la protection d’une manière ou d’une autre des officiels togolais comme l’indiquait assez doctement le contenu de la plainte. Aujourd’hui, même si, de gré ou de force, les trafiquants sont interpellés ou traqués par les autorités, hier, ou bien ils circulaient en toute impunité après avoir remis des commissions à leurs partenaires officiels, ou bien c’est en violation de la loi qu’ils sont expulsés avant de ses faire blanchir par les même tribunaux togolais. Or, dans aucun pays au monde, un trafiquant de drogue arrêté ne s’expulse pas après qu’on ait fini de le dépouiller de ses biens. Il est arrêté, jugé et condamné. Si c’est l’option de l’expulsion avec rapt des biens que les autorités togolaises choisissent, il y a donc lieu de se poser des questions sur les meneurs de cette formule réunis au sein de l’Agence Nationale des Renseignements (ANR).
Par ailleurs, aujourd’hui, il n’est pas contestable que beaucoup d’autorités togolaises se sont immensément enrichis grâce aux combines liées aux trafics de drogue et aux blanchiments d’argent. Cette réalité, les services secrets américains le savent et ont besoin d’avoir la version officielle de la plus haute autorité de l’Etat : Faure Gnassingbé. Cela débouchera sans doute sur des engagements à remédier aux méthodes de trafics. Un premier avertissement.
La Gouvernance politique et économique
Les Etats-Unis d’Amérique détestent la tendance qu’ont certains chefs d’Etat de s’accrocher au pouvoir comme leur coryza. Contrairement à ce qui est constamment véhiculé à dessein pour endormir l’opinion internationale, la gouvernance politique et économique au Togo est très bancale. Elle est marquée par des simulacres de dialogue avec l’opposition, une corruption élégamment entretenue du sommet à la base, une violation croissante des droits de l’Homme avec à la clé la torture, les arrestations et détentions arbitraires, les atteintes à la liberté de presse, la mauvaise répartition des biens de l’Etat, et pour couronner le tout, la mauvaise répartition des biens et richesses du pays. En témoigne la grande manifestation des Organisations des droits de l’Homme quelques jours seulement avant la visite du secrétaire d’Etat.
Toutes ces questions qui figurent déjà dans les rapports précédents de l’ambassade des Etats- Unis au Togo ont été versées dans l’agenda d’Hillary Clinton avant sa visite au Togo. Elle obtiendra les garanties claires de Faure Gnassingbé sur les élections à venir et sa participation pour un troisième mandat au mépris de la Constitution qui va bientôt comporter la limitation de mandats. Les Etats-Unis ne sauraient faire déplacer leur secrétaire d’Etat au Togo pour le plaisir de venir dire que les efforts sont satisfaisants alors que l’alternance politique n’est pas une réalité et que de grands enjeux mondiaux occupent les USA avec la crise israélo-palestinienne, les casse-têtes de la Syrie, de l’Irak et de l’Iran, la famine au Soudan ou encore la crise économique qui affecte aussi bien les Etats-Unis d’Amérique que les autres pays.
Raison suffisante qui oblige les autorités togolaises à rester plus calmes contrairement à des genres de visites ou sont organisées des parties de danses et de castagnettes, histoire de narguer son opposition. Préoccupés par les questions des Droits de l’Homme, les élections démocratiques et transparentes, la bonne gouvernance et la lutte contre la Drogue et le blanchiment d’argent, les Etats-Unis d’Amérique ne peuvent pas limiter les thèmes à l’ordre du jour de la visite d’Hillary Clinton aux seuls débats sur le Conseil de sécurité et de quelque soutien du Togo.
Le débat de la rencontre avec l’opposition
Loin d’être une médiatrice de la crise togolaise, Hillary Clinton est la secrétaire d’Etat Américain, l’équivalent du Ministre des Affaires étrangères. Avec ce titre, il est rare qu’elle se mette, au cours d’une visite officielle, dans le rôle de celle qui est venue écouter les doléances de l’opposition. L’opposition manifeste quotidiennement ses préoccupations de plusieurs manières, notamment à travers des manifestations publiques et la dénonciation des abus. Les Etats-Unis d’Amérique ont une ambassade au Togo qui fait le rapport sur toute la vie de la nation togolaise. Inutile pour Hillary Clinton de rencontrer l’opposition pour quelque raison et le fait pour elle de ne point prendre attache avec cette opposition n’est pas non plus un signe de désaveu. Un faux problème qui intéresse les débats frivoles à la togolaise.
En définitive, à travers cette visite éclaire de la secrétaire d’Etat américain, le peuple togolais devrait donc s’en réjouir puisqu’elle aura pour une fois l’occasion, à côté des questions diplomatiques et politiques, d’obtenir des garanties du pouvoir sur ses intentions en ce qui concerne la gouvernance politique et économique. C’est la démocratie togolaise qui sort gagnante de cette visite qui constitue, plus qu’une sommation, un avertissement à l’endroit des autorités togolaises faces aux enjeux politiques qui se profilent à l’horizon pour le Togo.
Carlos KETOHOU