Marche du 21 novembre pour exiger les réformes
Un complot ourdi par les « sécurocrates » contre les leaders du CAP 2015
. Le jeu dangereux joué par UNIR et la « Majorité silencieuse »
Vendredi 21 novembre 2014. Ce jour était censé enregistrer la marche pacifique organisée par le Combat pour l’alternance politique (CAP 2015). Mais les militants et sympathisants de cette alliance électorale de l’opposition devront partager les rues avec ceux du parti au pouvoir (ou présentés comme tels) qui a aussi improvisé une contre-manifestation. Faisant de cette date, une journée de toutes les incertitudes et de tous les risques. Déjà, un plan similaire à celui ayant conduit à l’arrestation des leaders du Collectif « Sauvons le Togo » dans l’affaire des incendies est ourdi dans les couloirs des « sécurocrates » contre les meneurs du mouvement de l’opposition.
CAP 2015, une marche du bon sens
« Exiger l’adoption et la mise en œuvre consensuelles des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales avant toute élection au Togo ». Tel est l’objectif de la marche organisée par le CAP 2015, constitué par l’Alliance nationale pour le changement (Anc), la Convention démocratique des peuples africains (Cdpa), le Mouvement des républicains centristes (Mrc), le Nouvel engagement togolais (Net), le Parti démocratique panafricain (Pdp), le Pacte socialiste pour le renouveau (Psr), Santé du peuple et l’Union des démocrates socialistes du Togo (Uds-Togo). « Une marche du bon sens », ainsi l’a qualifiée un compatriote, parlant de la revendication de cette manifestation. Les réformes constitutionnelles et institutionnelles exigées par tout le monde : opposition, société civile, église, diplomates. Une requête à laquelle le pouvoir reste malheureusement opaque.
Dans cette même veine, la Synergie des Organisations de défense des droits de l’Homme devra aussi descendre dans la rue le 28 novembre. Toujours pour réclamer ces réformes importantes pour la transparence, l’équité et l’apaisement de la cruciale élection présidentielle de 2015.
Au regard de la légitimité de cet enjeu, le Bloc d’action pour le changement (Bac) de Thomas N’soukpoé demande au parti au pouvoir et ses alliés de prendre part à ces deux manifestations pour « montrer aux yeux de la communauté nationale et internationale que personne aujourd’hui au Togo n’est contre les réformes politiques ». Mais il aura sans doute prêché dans le désert.
Contre-manifestations de l’UNIR et de la « Majorité silencieuse »
L’information avait été annoncée dans un premier temps par les caisses de résonance du pouvoir, puis reprise en boucle par plusieurs autres médias. L’Union pour la République (Unir) devrait également battre le pavé ce vendredi 21 novembre. Il s’agit simplement d’une contre-manifestation improvisée pour prendre le contre-pied de celle l’opposition. Contrairement au CAP 2015 qui a indiqué son itinéraire, le parti au pouvoir n’a pour l’instant sorti aucun communiqué officiel pour en indiquer les motivations.
Comme si cela ne suffisait pas, c’est la fameuse « Majorité silencieuse » qui entre dans la danse et annonce aussi deux manifestations ces 21 et 28 novembre où le CAP 2015 et la Synergie des Oddh prévoient descendre dans la rue. L’information a été confirmée par les responsables de ce machin-truc vendredi dernier, à travers un point de presse.
La provocation gratuite, les risques encourus
Provocation, c’est le mot qui sied bien à la situation. D’autant plus que les manifestations improvisées par le parti au pouvoir et ce fan club de Faure Gnassingbé n’ont d’autres objectifs que de contrer les marches légitimes prévues par le CAP 2015 et les Oddh. Répondre du tic au tac, montrer que personne n’a le monopole de la rue, que les partisans du pouvoir ont aussi leur mot à dire, objecte-t-on simplement. Si au niveau de l’Unir, on agit un peu avec réserve, la provocation délibérée vient beaucoup plus du côté de la fameuse « Majorité silence » dont les responsables se sont laissés aller vendredi dernier à des écarts de langage et à des accusations dangereux.
Le Mouvement des jeunes pour la popularisation de la bonne gouvernance (Mjpg), initiatrice de la marche, entend « exiger de l’opposition qu’elle se calme, qu’elle se prépare sérieusement aux élections présidentielles plutôt que de gesticuler inutilement, et surtout qu’elle cesse de rêver d’une insurrection populaire au Togo ». Pour ses responsables, les marches de l’opposition et des Oddh, sont des manœuvres pour forcer l’insurrection populaire. « Nous tenons à dire haut et fort que la Majorité silencieuse est plus que jamais attachée à la légalité constitutionnelle. En Démocratie, on ne respecte pas la loi seulement lorsqu’elle est favorable. On respecte la loi en vigueur, un point c’est tout. Et la loi en vigueur sera respectée. C’est l’engagement de la majorité silencieuse. Et pour que cela soit bien clair pour tous, nous l’exprimerons massivement les 21 et 28 novembre prochains », indique un communiqué du mouvement, et de préciser : « L’insurrection n’aura pas lieu, nous en sommes désolés !».
Est-ce normal qu’au moment où toutes les voix appellent à la mise en œuvre des réformes nécessaires à la transparence et à l’apaisement du scrutin de l’année prochaine, un engagement librement pris par le pouvoir en 2006, il se trouve des gens à s’y opposer simplement par ego ? Il faut le constater, une certaine largesse est accordée par le pouvoir à cette association qui fait dans l’agression verbale et la provocation pure et simple depuis un bout de temps. On se rappelle que récemment, alors que les Oddh ont fustigé le retour tacite de Yotroféï Massina à la tête de l’Agence nationale de renseignement (Anr), les responsables de cette association de soutien à Faure Gnassingbé ont fait une sortie pour prendre la défense de ce tortionnaire assermenté et le peindre tout en blanc. Pourtant l’homme a été cité par ses victimes et dans le rapport de la Commission nationale des droits de l’Homme (Cndh) sur la torture. Ce n’est rien d’autre qu’une préparation ouverte des esprits à la violence, un jeu dangereux pour la quiétude nationale. Avec ces écarts de langage, de là à provoquer des accrochages entre les cortèges antagonistes ces 21 et 28 novembre prochains, le pas est vite franchi. Et les conséquences devraient être dramatiques si cela devrait arriver. Ce rôle a été joué par des proches de Blaise Compaoré en amont de la journée du 30 octobre 2014, qui ont appelé ouvertement à la violence contre les anti-référendum. Mais la suite, tout le monde la connaît.
Le coup fomenté contre les leaders du CAP 2015
De toutes les marches prévues du côté des partisans de la mise en œuvre des réformes, celle du CAP 2015 fait faire les gouvernants dans leur froc. Et dans le sérail, on échafaude des plans pour appréhender des membres influents de l’alliance électorale mise en place par le Collectif « Sauvons le Togo » et la Coalition Arc-en-ciel pour arracher l’alternance en 2015.
Selon les indiscrétions provenant d’une source bien introduite dans le sérail, un scénario semblable à celui monté dans l’affaire des incendies et ayant abouti à l’arrestation des leaders du Cst, est encore mijoté dans les arcanes des « sécurocrates ». Le plan consisterait à faire infiltrer la manifestation par des jeunes à la solde du pouvoir qui ont pour mission, de provoquer des échauffourées et de blesser sérieusement deux agents des forces de l’ordre qui seront déployés sur le terrain. Une agression qui devrait servir de prétexte au pouvoir pour procéder à l’arrestation de certains leaders du CAP 2015. Trois d’entre eux identifiés comme les plus en vue dans cette mobilisation des populations pour les réformes, sont notamment visés : Alphonse Kpogo, le Secrétaire général démissionnaire de l’Alliance des démocrates pour le développement intégral (Addi) ; Abass Kaboua, le président du Mouvement des républicains centristes (Mrc) et Eric Dupuy, le Secrétaire national à la Communication de l’Alliance nationale pour le changement (Anc). Ces trois hommes sont fichés par les « sécurocrates » comme ceux qui vont sonner la mobilisation sur les radios. Ces arrestations viseraient donc à casser le mouvement. L’argument massue serait que cette marche est une insurrection planifiée. La sortie des responsables du fameux Mjpg qui ont ouvertement parlé d’insurrection, est loin d’être gratuite. Une réunion se serait tenue mercredi dernier entre les « sécurocrates » afin de régler les derniers détails du scénario.
En outre, comme l’a annoncé jeudi dernier notre confrère en ligne « togoinfos », l’armée a été mise en alerte maximale. « Par ailleurs, le Prince n’arrête pas de multiplier des coups de fil à l’endroit de certains officiers pour s’assurer que tout se passe bien, que rien n’est vraiment à signaler. Le Général Kadanga lui aussi s’active de façon électrique pour veiller au grain. Rien ne doit leur échapper. Dans la foulée et très subitement, Faure Gnassingbé est devenu particulièrement affectif et attentionné à l’égard des officiers postés à tous les niveaux stratégiques de l’armée. Il leur accorde une oreille particulière et fait montre d’une telle disponibilité que beaucoup d’entre eux perçoivent volontiers la peur qui l’habite en ce moment. En réalité, l’homme ne dort vraiment plus. Il n’est plus sûr de rien non plus. De guerre lasse, il se voit obligé d’opter pour la formule de la force brute qui va consister à contrer toute velléité de débordement ou même de manifestation dans certaines zones de la ville. La quasi-totalité de l’armée est réquisitionnée dans les casernes pour être déversée le moment venu sur le terrain en vue de mater si possible les manifestants qui oseront outrepasser les consignes que va décréter le Prince. Le camp de Zowla dans les Lacs vient de recevoir un renfort incroyable », a-t-il rapporté. Et de sources proches de la grande muette,