A l’étape actuelle du processus de réconciliation, les FAT ont suffisamment démontré par leurs actes qu’ils ne sont pas disposés à se réconcilier véritablement avec les populations qu’ils avaient traitées comme des ennemis à certains moments de l’histoire de notre pays. On voit bien que dans les événements de Barkoissi (1991) Mango (2005) Soudou (1992), les FAT nient catégoriquement avoir commis la moindre exaction alors que certains de ceux qui ont commis ces exactions sont encore en vie.
Contrairement à ce qu’on veut faire croire aux Togolais, le braquage de la CVJR par les FAT à Lomé n’était qu’un avant goût d’un coup de force permanent contre le processus de réconciliation en cours. La conspiration a été bien murie et vise deux objectifs.
D’abord, dissuader des éléments de l’armée qui, individuellement, voudraient témoigner et faire acte de contrition. Dans ce sens, le fait que la CVJR s’adresse à l’Armée en tant qu’institution, empêche la manifestation de la vérité. Secundo, ce braquage vise à arrêter Koffigoh dans son élan, pour éviter qu’il ne fasse davantage de révélations publiques, étant donné qu’il est censé connaitre en tant que ministre de la défense pendant la transition, des renseignements précis sur les éléments de l’armée impliqués dans les exactions contre les populations.
Et tout naturellement, dans l’entourage de Faure, on raconte que le remède a été trouvé pour dissuader l’ex-premier ministre de faire une ou d’autres témoignages publics. Si donc à Lomé le Colonel Djibril a été chargé de lire une déclaration nauséabonde et révoltante allant jusqu’à nier que des éléments de l’Armée ont battu à mort et jetés des citoyens dans la lagune de Bè tout en reconnaissant maladroitement que l’Armée a mené une opération de charge, dans le nord du pays, le Colonel Lémou s’est évertué à rejeter toute responsabilité de l’Armée dans les actes répréhensibles.
En ce qui concerne l’attentat de Soudou la dénégation des FAT frise la honte et le dégoût parce que les populations de Kpéwa, Koumondè, Bafilo et Soudou connaissent bien ces éléments de l’Armée qui, sous la conduite du Capitaine Ernest Gnassingbé ont tiré sur le convoi de Gilchrist Olympio à Soudou. Qui plus est, une commission d’enquête internationale de la FIDH a produit un résultat accablant contre les FAT dans cette affaire. Et le plus cynique c’est que les FAT vont jusqu’ à attribuer les actes posés à des éléments incontrôlés, alors que dans une déclaration précédente le terme “incontrôlé” a été à tort attribué à Koffigoh alors que c’est Eyadèma qui l’a employé pour désigner des éléments hors la loi qu’il protège. Si donc Ernest est un élément incontrôlé, alors toute l’Armée n’est composée que d’incontrôlés qui sont prêts à récidiver puisque le haut commandement les protège.
On l’a toujours dit et les faits nous donnent raison. Tant que les bourreaux sont toujours au pouvoir et refusent de reconnaitre leur tort et continuent de narguer les populations en considérant que l’uniforme qu’ils portent et qui a été acheté avec l’argent de leurs compatriotes civils, leur confère le droit de vie te de mort sur ceux-ci, tant que l’armée continuera à être commandée par des négationnistes en uniforme qui exercent une influence sur la vie politique, il n’y aura jamais de réconciliation au Togo.
A l’issue de la cantate de la CVJR on peut habiller quelques guignols en tee-shirts à l’effigie de plusieurs partis pour grimacer lors d’une cérémonie officielle, ce serait un coup d’épée dans l’eau.
A.S
Le Regard N° 751 du 05 octobre 2011