Christian Charrière-Bournazel
Avocat au Barreau de Paris
Ancien Secrétaire de la Conférence
Ancien Bâtonnier de l’Ordre
Anita Anton
Avocat au Barreau de Paris
DEA de philosophie de droit
DESS droit des assurances
Naïma Moutchou
Avocat au Barreau de Paris
DESS droit des affaires – DJCE
Paris, le 19 septembre 2011
Monsieur le président
Messieurs les juges composant la Cour
Suprême de Lomé
République du Togo
Siégeant en audience spéciale
LOMÉ
TOGO
Télécopie: 00 228 22 21 88 00
AFFAIRE: Député Kpatcha GNASSINGBE C/ MP
CCB/VP
Messieurs les président et juges,
Le bâtonnier Mario Stasi m’a rendu compte de la mascarade judiciaire à laquelle vous vous êtes livrés à l’encontre de M. Kpatcha Gnassingbé et de ses malheureux co-inculpés.
Déjà, vous aviez trouvé tout à fait normal que la défense ne soit prévenue de la date d’audience que huit jours auparavant, sans avoir eu communication de l’intégralité du dossier. Vous aviez feint de prendre en compte ma demande de remise: c’était pour la forme puisque vous avez accordé un renvoi à une semaine !
Quant à l’audience elle-même, ce qu’on m’en a dit, scelle votre déshonneur: rien ne vous a arrêtés, ni la vacuité du dossier, ni les témoignages poignants d’hommes montrant les marques des tortures qu’ils avaient subies pour leur arracher des aveux, ni l’outrecuidance du général Katanga venu comme témoin à la barre, mais en réalité vous donnant des ordres pour condamner sans que vous émettiez la moindre protestation.
Vous avez, sans frémir, condamné à des peines d’emprisonnement allant jusqu’à vingt ans des hommes innocents. Vous n’en avez relaxé aucun, malgré les réquisitions du ministère public qui cherchait à en épargner quelques uns.
Je n’escompte d’aucune manière l’éveil de votre conscience. Sachez seulement qu’un jour ou l’autre, inexorablement, l’histoire est amenée à juger les juges.
Je souhaite que ce jour-là, vous soyez confrontés à des juges dignes de ce nom et que vous puissiez compter sur le dévouement, l’intégrité et le talent d’avocats semblables à ceux dont vous avez méprisé les plaidoiries.
Je n’ai évidemment aucun respect à vous manifester.
En revanche, je rends publique ma présente lettre à vous-mêmes à laquelle j’estime devoir donner le plus large écho possible.
Bâtonnier Christian Charrière-Bournazel
Liberte N° 1055 du 2& septembre 2011