Répression des manifestants au Togo : Faure va-t-il droit dans le mur ?
mercredi 22 août 2012
Une dizaine de blessés. C’est le triste bilan que l’on peut dresser après la répression de la marche organisée par le Collectif sauvons le Togo, le 21 août dernier, et qui rappelle, si besoin en est, les quatre décennies de règne de Gnassimbé Eyadéma, caractérisées par la violence et les intimidations de tous genres. Pourtant, tout semblait être réuni pour que cette marche se fasse dans les règles de l’art si les agents de forces de l’ordre n’avaient pas dérogé à leur mission d’encadrer les manifestants afin d’éviter tout débordement. Comme le dit l’adage, chassez le naturel et il revient au galop. Le président togolais a encore fait ce qu’il peut le mieux en recommandant la répression aux forces de l’ordre.
Or, cette marche, qui se voulait pacifique et qui n’est pas la première du genre organisée par cette organisation de la société civile, n’avait que pour seul objectif de réclamer des changements dans le code électoral avant les élections législatives prévues pour octobre prochain. D’ailleurs, quoi de plus normal pour un pays qui se veut démocratique que des voix s’élèvent pour exiger que toutes les conditions soient réunies avant la tenue d’un scrutin.
Il est évident que Faure Gnassimbé n’entend pas recevoir des leçons de démocratie de la part de quiconque, encore moins voir des citoyens remettre certaines lois en cause. Il est vraiment déplorable qu’il en soit arrivé à cette situation extrême surtout qu’il semble, depuis un certain temps, privilégier la méthode de répression pour dissuader tout type de protestation ou tout mouvement. En effet, ce n’est pas la première fois que ce dernier procède de la sorte pour disperser les manifestants lors des marches. On se souvient qu’il avait déjà fait parler la foudre lors d’une première marche orchestrée par ledit Collectif.
Cette énième répression conforte une certaine opinion qui pense que Faure Gnassimbé est en train de suivre les traces de son père, qui s’est notamment illustré à travers la dictature qu’il a exercée pendant son long règne. Et à y voir de près, ce qui se passe actuellement au Togo n’est ni plus ni moins que l’expression d’une dictature à peine voilée par une comédie démocratique. Qu’à cela ne tienne, le peuple togolais, qui a tant souffert sous le règne de Gnassimbé Eyadéma, n’entend pas renoncer si facilement à la démocratie, encore moins à la liberté. D’ailleurs, la dernière marche ne vient que confirmer cette volonté puisque les organisateurs de la marche ont laissé entendre qu’ils comptaient aller jusqu’au bout de leur logique.
Le ton est donc donné, et le président peut être sûr qu’il trouvera, dans les jours à venir, le Collectif sauvons le Togo sur son chemin. En homme averti, il lui appartient à présent de ne pas minimiser ces mouvements répétitifs de foule, du reste, légitimes, et qui s’expliquent, par ailleurs, par l’inexistence d’un cadre de dialogue qui puisse permettre aux Togolais de s’exprimer. Au lieu donc de réprimander les manifestants chaque fois que ceux-ci protestent, le régime actuel gagnerait à les écouter, à travers leur porte-parole, afin de trouver une solution à leurs préoccupations.
Car, comme on le dit, la violence ne résout pas les problèmes, mais ne fait que les déplacer. Ailleurs, ce sont des sentiments de frustration qui ont grandi et qui ont donné naissance aux grands mouvements populaires qui ont emporté des régimes. Il s’agit de l’Afrique du Nord, où des dirigeants, qui ont fait plus de vingt ans au pouvoir, et qui n’avaient autre moyen d’intimidation que la violence et les représailles, ont été emportés par des mouvements populaires. De toute évidence, Faure Gnassimbé n’a pas tiré leçon du Printemps arabe et semble se plaire dans son rôle. Pourtant, il semble que le moment est mal indiqué pour un président d’adopter une politique répressive.
Avec un réveil de conscience de plus en plus accuse des peuples, jadis caractérisés par une passivité suicidaire. Cette époque est purement et simplement révolue et doit faire place aux aspirations légitimes des peuples. Il ne faut donc pas les en priver. Tout président qui s’hasarderait à fermer les yeux sur les revendications va tout droit dans le mur
Le Quotidien
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TOGO : La tension politique ne baisse pas
00:57 23.08.2012
Quelque part, dans l’indifférence totale de la communauté internationale, se joue une haletante crise politique au Togo. Un indicible et interminable bras de fer entre le président Faure Gnassimgbé et l’essentiel de son opposition. Depuis plusieurs semaines, on assiste quasi-quotidiennement à la même scène. D’un côté, des militants de l’opposition plus en plus nombreux, et dont la détermination monte crescendo. Et de l’autre, des forces de l’ordre puissamment mobilisées et déterminées à faire échec à toute manifestation hostile au régime en place. Malheureusement, le face-à-face se termine toujours avec un nombre élevé de blessés et plusieurs interpellations. Un résultat qui n’est point de nature à détendre le climat politique dans ce pays, qui n’est pas toujours l’exemple d’une séduisante démocratie… 0:57 23-8-2012
On se serait attendu à ce que le président Faure Gnassimgbé opte pour le profil bas dans ses rapports avec ses adversaires. En effet, il traine déjà le fait qu’il soit l’incarnation d’une “dévolution monarchique”. Par ailleurs, il s’est fait élire en 2005 dans des conditions de troubles et de violences si dramatiques que raisonnablement, il devrait chercher à effacer son ardoise en toute humilité. Seulement, il ne voit pas ainsi les choses.
Ayant appris la gestion du pouvoir dans l’ombre de son défunt père, Faure Gnassimgbé ne connait décidément pas le langage de la modération et du dialogue dans son rapport avec ceux qui voient les choses différemment que lui-même. C’est ainsi que, se cramponnant sur les réformes récemment adoptées par l’Assemblée national à propos du nouveau code électoral, il n’entend nullement céder aux revendications du collectif “Sauvons le Togo”. Un collectif qui regroupe des structures politiques et d’organisations de la société civile opposées au président togolais, et qui soupçonnent les réformes contestées, comme la voie royale menant à une fraude électorale, lors du scrutin législatif prévu au mois d’octobre prochain.
Des semaines et des semaines de manifestations assidues ne semblent convaincre le pouvoir togolais de se mettre à l’écoute des protestataires. En lieu et place, on s’oppose à l’exercice du droit de manifester et en charge invariablement les manifestants de l’opposition. Dernièrement, quand la pression est devenue trop forte, Faure Gnassimgbé avait choisi de sacrifier son premier ministre. Mais on se rend bien compte que si les titulaires de la primature togolaise peuvent changer, l’attitude face à l’opposition, elle, demeure inchangée.
Au regard du passé du président togolais qui est loin d’être élogieux, on n’est pas forcément surpris par le martyre qu’il fait subir à ses adversaires. Par contre, incompréhensible et décevante est l’attitude de la communauté internationale. Une fameuse communauté internationale qui se détourne du sort terrible que Faure Gnassimgbé réserve à son peuple.
Une écœurante bienveillance qui se perpétue du père au fils. Parce qu’il est vrai que c’est avec la bénédiction des chancelleries occidentales que Faure a succédé l’autre Gnassimgbé.
Fodé Kalia Kamara pour Guineeconakry.info