Le Ministre de l’Administration Territoriale est incompétent pour procéder à l’interdiction incriminée

DECLARATION LIMINAIRE DE LA CONFERENCE DE PRESSE DU 20 AOUT 2012

 

Le Lundi 14 Août 2012, une délégation du Collectif « SAUVONS LE TOGO » conduite par Me Ata Messan Zeus AJAVON a été reçue à la demande du Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales.

Il était entouré pour la circonstance des Ministres Damehane YARK, Doris WILSON de SOUZA respectivement, Ministre de la Sécurité et de la Protection Civile et Ministre des Droits de l’Homme, de la Consolidation de la Démocratie et de la Formation Civique.

La délégation du Collectif « SAUVONS LE TOGO » était composée outre Me Zeus AJAVON, de Monsieur Agbéyomé KODJO, Me Raphaël KPANDE-ADZARE, Me Jil-Benoît AFANGBEDJI, Monsieur Tchakoura BODE et Monsieur Edem ATANTSI.

Cette rencontre, qui a duré près de trois (03) heures, s’inscrivait dans le cadre d’une prise de contact et au cours des échanges, les débats se sont focalisés sur  la marche suivie du sit-in prévue par le Collectif « SAUVONS LE TOGO » pour les 21, 22 et 23 Août 2012.

Contre toute attente et contre toute logique juridique, le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales, Monsieur Gilbert BAWARA, a cru devoir sortir un communiqué au contenu fallacieux et mensonger  en date à Lomé du 14 Août 2012 interdisant de façon permanente, absolue et générale « Deckon » comme lieu de chute des manifestations du Collectif « SAUVONS LE TOGO ».

Au soutien de cette interdiction méprisant la liberté de manifestations constitutionnellement reconnue et qui, plus est, relève d’un autre âge, le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales a prétendument allégué « un souci de prémunir l’ensemble des citoyens non concernés par les manifestations contre les risques d’incidents » et de « leur permettre de vaquer librement à leurs occupations ».

Une telle interdiction est d’autant plus illégale que l’article 30 alinéa 1 de la Constitution togolaise du 14 Octobre 1992 dispose clairement que « l’Etat reconnaît et garantit dans les conditions fixées par la loi, l’exercice des libertés d’association, de réunion et de manifestation pacifique et sans instruments de violence ».

Il est sans contestation aucune que la seule et unique loi portant réglementation des libertés de manifestations sur toute l’étendue du territoire national est la loi N°2011-010 du 16 Mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestation pacifique publique, laquelle loi est communément appelée « Loi BODJONA» du nom du Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales qui l’a initiée.

 A plusieurs égards, l’interdiction litigieuse est fort contestable.

I – SUR L’AUTORITE ADMINISTRATIVE COMPETENTE A INTERDIRE

DES MANIFESTATIONS

Aux termes de l’article 4 de la loi N° 2011-010 du 16 Mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestation pacifiques publiques au TOGO « les réunions et manifestations pacifiques publiques telles que définies à l’article 3 ci-dessus, sont soumises au seul régime d’information ou de déclaration préalable auprès de l’autorité administrative compétente ».

En outre l’article 9 de la même loi dispose que « toute réunion ou manifestation pacifiques publiques sur la voie publique et dans les lieux publics est soumise à une déclaration préalablement adressée : 3. au Maire de la commune concernée ».

De l’application combinée des articles susvisés, il résulte que seul le Président de la Délégation Spéciale de la Commune de Lomé est l’autorité administrative compétente pour connaître de l’information ou de la déclaration des manifestations du Collectif « SAUVONS LE TOGO » prévues pour se dérouler les 21, 22 et 23 Août 2012.

Il ne peut en être autrement puisque le carrefour Deckon annoncé pour abriter les manifestations dont s’agit fait incontestablement partie de la commune de Lomé relevant du ressort du Président en cause.

Mieux, les manifestations litigieuses n’ont aucunement un caractère national, et encore moins, une portée internationale pouvant donner compétence au Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales.

De tout ce qui précède, il s’infère que le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales est incompétent pour procéder à l’interdiction incriminée.

Ainsi c’est en violation  flagrante des pertinentes dispositions de l’article 9 sus-visé que ledit Ministère a cru devoir faire défense au Collectif « SAUVONS LE TOGO » d’organiser au carrefour Deckon ses manifestations prévues pour les 21, 22 et 23 Août 2012 suivant un communiqué fallacieux, mensonger et provocateur en date à Lomé du 14 Août 2012.

 

II – SUR L’ABSENCE  DE NOTIFICATION DE L’INTERDICTION QUERELLEE AU COLLECTIF « SAUVONS LE TOGO »

 

Suivant les dispositions de l’article 14 de la loi N°2011-010 du 16 Mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestations pacifiques publiques « les observations, recommandations et constatations de l’autorité administrative compétente sont notifiées aux Organisateurs, par remise en mains propres contre récépissé, par télécopie ou par tout autre moyen équivalent avec accusé de réception, au plus tard soixante douze (72) heures avant la date prévue pour la tenue de la réunion ou de la manifestation ».

Il en résulte que non seulement que l’interdiction de manifestation doit émaner d’un acte administratif mais également que toutes observations,  recommandations et constatations de l’autorité administrative compétente doivent faire l’objet de notification aux organisateurs dans un délai de soixante douze (72) heures via l’un des moyens énoncés à l’article susvisé.

Il n’est nullement contesté que l’interdiction querellée ne procède pas d’un acte administratif. En outre, alors même que nous sommes seulement  à quelques heures du début des manifestations en cause, il est constant que le Collectif « SAUVONS LE TOGO » ne s’est vu notifier une quelconque observation, recommandation ou constatation  de la part de l’autorité compétente qui n’est personne d’autre que le Président de la Délégation Spéciale de la Commune de Lomé dans les formes fixées par l’article 14 de la loi N°2011-010 du 16 Mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestation pacifique au TOGO.

A supposer que le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales soit compétent, ce qui n’est d’ailleurs pas le cas, il devrait nécessairement respecter aussi bien les délais que les formes prévus à l’article sus-indiqué.

En se contentant d’un simple communiqué en date à Lomé du 14 Avril 2012 dans la parution de TOGO-PRESSE du Jeudi, 16 Août 2012 pour interdire les manifestations litigieuses, le Ministre a manifestement méconnu les dispositions de l’article susvisé.

III – UNE MANIFESTATION PUBLIQUE NE PEUT FAIRE L’OBJET DE       L’INTERDICTION PERMANENTE, ABSOLUE ET GENERALE

Aux termes des dispositions de l’article 14 de la Constitution togolaise du 14 Octobre  1992 «  l’exercice des droits et libertés garantis par la présente constitution ne peut être soumis qu’à des prescriptions expressément prévues par la loi et nécessaire à la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé publique, de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui ».

Il s‘en infère, sans la moindre ambiguïté, qu’une manifestation à caractère public ne peut souffrir d’une interdiction permanente, absolue et générale.

Du même  article, il résulte qu’une décision portant interdiction de manifestation ne peut être prise qu’à la condition qu’elle soit nécessaire à la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé publique, de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui.

Il ne fait l’ombre d’aucun doute que les manifestations projetées par le Collectif « SAUVONS LE TOGO » ne portent en rien atteinte à la sécurité nationale, à l’ordre public, à la santé publique, à la salubrité publique, à la tranquillité publique, la morale ou aux libertés et droits fondamentaux de la population togolaise.

Ainsi, l’interdiction de manifestation dans les rues de Deckon faite par le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales dans son communiqué en date à Lomé du 14 Août 2012 au Collectif « SAUVONS LE TOGO » heurte manifestement de front l’article 14 de la Constitution togolaise du 14 Octobre  1992.

L’interdiction irrégulière et illégale doit donc être considérée comme nulle et de nuls effets. Il en va de même de celle de la Conférence de presse de ce jour du 20 Août 2012 du Ministre de la Sécurité et de la Protection Civile.

Eu égard à tout ce qui précède, le Collectif « SAUVONS LE TOGO » considère le communiqué du Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales et la Conférence de presse du Ministre de la Sécurité et de la Protection Civile comme non seulement un épiphénomène mais aussi comme un non évènement, qui ne saurait le distraire et l’émouvoir, encore moins le peuple togolais dans sa détermination à imposer le retour des fondamentaux de la République, et le respect absolu des droits humains.

En conséquence, le Collectif « SAUVONS LE TOGO » invite toutes les populations de Lomé et de ses environs ainsi que des préfectures avoisinantes à se mobiliser massivement pour les manifestations des 21, 22 et 23 Août 2012 en se munissant d’un drapelet, signe de notre attachement à notre chère République.

Le Collectif « SAUVONS LE TOGO » prend la communauté internationale à témoin et rappelle qu’il a pour lui la légalité, et que c’est le régime en place qui s’enlise dans l’imposture et le déni droit.

 

Peuple togolais, par ta foie, ton courage et tes sacrifices, la nation togolaise doit renaître !

                                                                          Fait à Lomé, le 20 Août 2012

Pour le Collectif « SAUVONS LE TOGO »,

Le Coordinateur,

 

Me Zeus Ata Messan AJAVON