La rançon de l’arrogance et de la mauvaise foi.

Boycott du dialogue par  l’opposition

La rançon de l’arrogance et de la mauvaise  foi.

Le premier ministre togolais, Arthème Ahoomey-Zunu a adressé  une nouvelle  invitation au dialogue à onze partis politiques et deux organisations de la société civile. Les poids lourds de l’opposition  à l’instar de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), l’Organisation pour bâtir  dans l’union un Togo solidaire (OBUTS), le Comité d’action pour le renouveau (CAR) et la Convention démocratique des peuples africains (CDPA) ont fait défection en déclinant l’invitation. La raison évoquée est l’insatisfaction de leurs préalables. Certains parlent aussi de la mauvaise volonté du pouvoir à créer des conditions véritables pour un dialogue franc et sincère.

Cela ne semble plus être une surprise pour personne. Le gouvernement Ahoomey-Zunu a adressé la semaine dernière, une nouvelle invitation au dialogue à la classe politique. Au menu des discussions figurent le code électoral et le découpage des circonscriptions électorales. Cette invitation fait suite à une première qui était adressée il y a deux semaines à la classe politique de l’opposition qui l’avait aussitôt balayée du revers de la main.  La nouvelle invitation vient d’être déclinée par la majorité  des partis conviés. L’Alliance nationale pour le changement (ANC) de Jean-Pierre Fabre, l’Organisation pour bâtir  dans l’union un Togo solidaire (OBUTS) d’Agbéyomé Kodjo  ou encore le Parti du renouveau et de la rédemption (PRR) de Nicolas Lawson ont dit non à cet appel. Au cours d’une conférence de presse organisée dimanche 09 septembre, le Collectif Sauvons le Togo dont fait partie l’ANC et OBUTS a signifié clairement son refus du énième dialogue.

Les motifs étaient entre autre le règlement de certains préalables comme le respect de la liberté de manifestations et des droits de l’homme, la démission et la traduction devant les tribunaux des falsificateurs du rapport de la CNDH, le retour à l’Assemblée des neuf députés de l’ANC,  la restitution du matériel de sonorisation confisqué par la gendarmerie depuis le 13 Juin dernier et le déroulement du dialogue sous l’égide d’un médiateur international.

  De plus, le Collectif estime que si dialogue, il doit y avoir, ce ne serait pas seulement deux formations politiques issues de ses rangs qui seront invitées mais l’ensemble de ses composantes politiques.

Le CAR conditionne sa participation à l’invitation des regroupements de partis comme ARC –en-Ciel, le CST ainsi que l’inscription à l’ordre du jour de la réforme sur la limitation du mandat présidentiel.

Le PRR dans un courrier daté d’hier adressé aux représentants de l’Union Européenne et du PNUD conviés à ce round de discussions en tant que témoins par le gouvernement, appelle ceux-ci à refuser cette invitation. « Nous vous demandons expressément de ne pas participer aux manigances d’un tel gouvernement », pouvait-on lire dans ce courrier.  Nicolas Lawson justifie le refus de son parti à ce dialogue par le fait que  les propositions issues  du CPDC rénové sur les réformes constitutionnelles, institutionnelles et des questions électorales soumises au Premier Ministre Gilbert HOUNGBO ne soient pas prises en compte.

Il convie les institutions précitées à ne pas servir de couverture pour le régime en place : « Vos institutions ne doivent en aucun cas et pour aucune raison servir de couverture à un régime infâme né d’un attendant monstrueux et qui se pérennise par les fraudes électorales, les violences de toutes sortes et la fourberie », lance-t-il encore dans son courrier.

En clair,  le dialogue lancé par le pouvoir vient de connaître un échec avant son ouverture. Il revient donc au gouvernement d’assumer les conséquences qui s’imposent.

Selon nombre d’observateurs, l’opposition n’exige pas un miracle.  Ses revendications peuvent être satisfaites si le gouvernement est animé d’une réelle volonté de faire bouger les choses. La restitution des matériels de sonorisation gardés arbitrairement par la gendarmerie togolaise n’était pas un sujet à débattre.

 Si le gouvernement est animé d’une réelle volonté, il pouvait prendre en compte les revendications de l’opposition  afin de faire bouger les lignes. Si à chaque appel, l’opposition brandit des préalables que le gouvernement s’obstine à ne pas satisfaire, inutile de lancer des appels. Ce ne serait une perte de temps  de maintenir le pays dans un statu quo. Les réformes constitutionnelles, institutionnelles et les autres revendications de l’opposition perdurent seulement par manque de volonté politique et le désir de se pérenniser au pouvoir.

La tête du nouveau PM, un obstacle

Le radicalisme exprimé depuis lors par les partis de l’opposition face à l’appel au dialogue est assez symptomatique de désir de rendre à l’interlocuteur les différents numéros d’arrogance et de mépris infligés  aux acteurs politiques alors qu’il était encore à la Présidence en qualité de secrétaire Général. La tête d’Ahoomey Zunu ne plaît pas. L’on a constaté l’indifférence et la désapprobation que la nomination de l’homme de Kpélé à la Primature a suscitées. La tête du Premier ministre ne rassure pas les acteurs. On connaît ses positions ambigües, méprisantes, qui indisposent l’interlocuteur. On connaît ses préjugés, vis-à-vis des sujets. On connait ses tendances fanatiques sur les débats. Bref, un beau parleur qui ne pourra  amener les partis à tomber d’accord sur le minimum. Autant ne pas perdre le temps avec cet homme qui ne semble seoir au poste de Premier Ministre. Cette pesanteur pèse lourd dans la balance du refus par les partis d’opposition de répondre à ce dialogue.

 Si le nouveau Premier Ministre a été investi à l’Assemblée nationale par 66 députés sur 81, soit plus que la majorité qualifiée de 65 députés (4/5) pour adopter les réformes constitutionnelles et institutionnelles proposées par le CPDC et le CPDC rénové, cela prouve à suffisance que l’enlisement de la situation politique n’est que la résultante de la mauvaise foi et le goût du pouvoir. En tout cas, l’opposition dans sa grande majorité ne compte pas se faire prendre au piège vulgaire et malicieux d’un nouveau dialogue qui est un nouvel essai de roublardise d’un régime aux abois.

Jean-Baptiste ATTISSO

L’INDEPENDANT express N° 227 Du 11 SEPTEMBRE 2012