La marche réprimée depuis le lieu du rassemblement, malgré le changement d’itinéraire

La marche réprimée depuis le lieu du rassemblement, malgré le changement d’itinéraire

Au moins deux Gendarmes en civil ayant infiltré les manifestants ont été appréhendés

 

Dans leur logique de musellement du CST et d’interdiction à peine voilée de ses activités publiques, le pouvoir de Faure Gnassingbé, poussant plus loin son outrecuidance après la barbarie humaine de la veille, a étouffé grâce à la soldatesque, au lieu de rassemblement des manifestants, la marche, telle une tempête dans un verre d’eau. Mais les jeunes ont répondu à cette énième sauvagerie des forces dites de l’ordre, avec tout ce qui était à portée de leurs mains, les pierres et autres projectiles. L’ambiance était très surchauffée hier à Bè-Château, entre jeunes manifestants et forces de l’ordre.

Il était environ 11 heures. Il faisait superbement beau, tout comme la veille. Mais depuis les premières heures du jour, hommes, femmes, jeunes et personnes âgées venus des différents quartiers de la capitale, convergeaient tous vers le carrefour Bè-Château le point de ralliement. Pour ne pas verser dans une guerre des chiffres, il est tout de même utile de rappeler que du château d’eau jusqu’au-delà des feux tricolores du marché de Bè, la rue était noire de monde.

Tous les responsables n’étaient pas encore sur le lieu de rassemblement quand on entonna l’hymne national devant marquer le début de la grande marche. Le cortège s’ébranlait vers le sud pour rejoindre le boulevard du Mono quand brusquement, le capitaine Agbenda ordonna à ses éléments de lancer les grenades qu’ils tenaient en mains. Au regard de l’impressionnant dispositif des forces de l’ordre dressé, personne ne se faisait d’illusions sur la mission à elles assignée. Ils étaient là dans un but autre que l’encadrement de la manifestation. Plus de la centaine d’éléments avaient des grenades en mains et en renfort, dans les poches de leurs pantalons et chemises. Devant la détermination des jeunes qui n’avaient l’air nullement ébranlés, les hommes en uniforme ont sonné la charge. C’était le début des échauffourées. Les heurts se sont poursuivis jusqu’aux quartiers périphériques d’Ablogamé et au niveau du Festival des Glaces. Le grand marché que les ministres Bawara et Yark déclamaient vouloir protéger, a été gagné par le mouvement et le boulevard du Mono bloqué dans les deux sens.

Mais parmi les manifestants, il y avait des mouchards ; des gendarmes en civil ayant pour mission d’infiltrer les jeunes et d’indiquer leurs positions à leurs collègues en uniforme. L’un d’entre eux, Agbémagnon Kodjovi de la Brigade du port qui s’identifie comme gendarme, déclare à son corps défendant, que c’est dans le cadre de leur mission qu’ils infiltrent les manifestants, et qu’ils ne peuvent pas être en tenue : « Si nous sommes en tenue, alors on doit rester à côté de nos collègues ». Son supérieur Gnondowou Kpatcha de la même brigade, sans savoir que son subalterne a déjà craché le morceau, a essayé d’embobiner la foule surchauffée. Mais les manifestants ont commencé à les prendre à partie avant que les responsables du CST alertés ne viennent les arracher de leurs griffes.

Dans la soirée d’hier, les responsables du CST ont animé un point de presse express pour dresser un bilan des deux jours de manifestations et tirer les conséquences qui en ont résulté. Loin de se laisser abattre, ils ont plutôt appelé les populations à continuer sur cette lancée. Ils invoquent même des dispositions constitutionnelles, notamment l’article 150 pour légitimer leur lutte. «  En cas de coup d’Etat, ou de coup de force quelconque, tout membre du gouvernement ou de l’Assemblée Nationale a le droit et le devoir de faire appel à tous les moyens pour rétablir la légitimité constitutionnelle, y compris le recours aux accords de coopération militaire ou de défense existants. Dans ces circonstances, pour tout Togolais, désobéir et s’organiser pour faire échec à l’autorité illégitime constituent le plus sacré des droits et le plus impératif des devoirs. Tout renversement du régime constitutionnel est considéré comme un crime imprescriptible contre la Nation et sanctionné conformément aux lois de la République », y lit-on.

Godson K.    

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