La fausse menace du délégué de l’UE à l’endroit des autorités togolaises

 

Depuis bientôt une quinzaine d’années, l’Union Européenne s’est rendue complice des fraudes massives au Togo en finançant des élections alors même que les recommandations qu’elle produisait à l’issue des scrutins, ne sont jamais mises en œuvre. Mais subitement alors que les diplomates européens se sont plusieurs mois durant rendus complices du dilatoire des autorités togolaises, M. Patrick Spirlet recouvre subitement sa lucidité. ” L’accompagnement de l’UE au processus électoral, dit-il, est lié à la mise en œuvre effective des recommandations des missions d’observation électorales. Si les assurances d’un processus crédible n’étaient pas en place, il est certain que l’UE n’accompagnerait pas financièrement le processus, car ce sont ces réformes qui sont le meilleur garant des élections crédibles et transparentes “.

Pourtant, ce diplomate qui parle ainsi, participait à des consultations périodiques qu’organise l’UE avec les autorités togolaises dans le cadre de l’Accord de Cotonou. Il s’agissait des séances de diversion à l’issue desquelles les diplomates européens racontent   que les choses vont bon train et que Faure Gnassingbé a une réelle volonté politique d’opérer des réformes. Tout naturellement, des rapports complaisants étaient envoyés à Bruxelles pour attester cette fausseté. Tout  le monde, sauf ces diplomates, savait que Faure menait tout le monde en bateau. Prestidigitateur hors pair, le chef de l’Etat fait annoncer la relance du processus électoral en conseil des ministres en même temps qu’il part en campagne au nom de son nouveau parti alors que les réformes à opérer pour le meilleur déroulement des prochains scrutins se font  toujours attendre.

Mais il y a lieu de s’interroger sur la sincérité de cette déclaration de Patrick Spirlet quand on sait que les diplomates européens s’étaient toujours évertués à pousser l’opposition à se soumettre aux quatre volontés des tenants du pouvoir.

Cette réaction tardive du diplomate européen résonne à bien des égards comme une aubaine pour le pouvoir et une autorisation à frauder  souverainement, loin des regards des observateurs de  l’institution européenne qui ne seront donc pas de la partie.

Et tout porte à croire que l’Union Européenne a crée une situation embarrassante dont elle tente de se soustraire par  une mise en garde qui ne trompe personne. Dans la situation actuelle encouragée par l’UE, financer ou ne pas financer les législatives revient à la même chose. A la limite, le gouvernement aimerait que l’UE lui laisse les mains libres pour organiser les élections à sa manière.

Et pour y arriver, il suffit de ne pas opérer les réformes et d’invoquer l’impératif de délai et le manque de moyens financiers (alors que le train de vie de l’Etat a augmenté), pour bâcler le processus en brûlant les étapes, et en improvisant pour mieux voler. Déjà, des indiscrétions font état de ce que des experts en matière de fraudes électorales venus de la RDC aux frais du contribuable togolais, seraient dans nos murs et multiplieraient des navettes entre un hôtel de la place et le site Togo 2000 pour le trucage des Kit en vue de reproduire ici la fraude organisée par le pouvoir de Kabila fils en RDC.

La solution n’est donc pas de menacer de ne pas financer le processus. Que fera l’Union Européenne si Faure Gnassingbé tente le forcing en organisant la fraude sans les réformes recommandées? En attendant une réponse claire à cette interrogation, on note que le Togo  se retrouve dans la même situation qu’en 1999 où Eyadèma,  comptant sur le soutien de Chirac, avait remis en cause les travaux du CPS de l’Accord Cadre de Lomé, au grand désarroi des facilitateurs de l’Union Européenne qui ont mis fin à leur mission pour organiser à sa manière les législatives en vue de s’offrir une majorité qualifiée pour modifier la Constitution et se maintenir au Pouvoir. Bien évidemment ceux qui ignoraient tout des ingrédients de ce hold up programmé, se plaisent aujourd’hui à raconter que si l’opposition avait participé à ces législatives, elle aurait pu empêcher la modification de la Constitution en 2002.

Bien évidemment, on peut construire tout un monde avec des si et des si. Or, il  était  apparu que la fraude avait été programmée de sorte à offrir plus de 70 députés au RPT. Il s’agissait d’un passage en force et la participation de l’opposition n’aurait rien changé au résultat recherché. A preuve,  ceux qui disaient qu’il fallait y aller pour ne pas laisser le boulevard à Eyadèma, savaient que tout le boulevard a été déjà occupé puisqu’ils n’ont pas osé y aller pour démontrer qu’ils pouvaient éviter la catastrophe. A la limite cette élection allait déboucher sur des massacres car Eyadèma était prêt à tout.

C’est dans ce même schéma que Faure veut s’inscrire cette année, à travers un scrutin abominable en cours de préparation. Mais la question est  de savoir si les Togolais sont assez bêtes pour ne pas lui opposer une insurrection appropriée. Mais une chose est sure, c’est que la violence est en train de s’inviter dans ce processus électoral qui s’annonce dangereux parce que miné. Et nul doute que cela arrangerait la fameuse communauté internationale devenue un charognard qu’attire la puanteur de nombreux cadavres humains en putréfaction.

AS

Le Regard N° 780 du 24 avril 2012