Inquiétudes grandissantes au sein de la famille Gnassingbé :Après Kpatcha, Rock?

Du feu en perspective dans la maison présidentielle

 

Le procès dans l’affaire de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat convertie en complot de coup d’Etat, a révélé au grand jour la grande division de la famille Gnassingbé. Il ressort du grand déballage que c’est plutôt une dispute autour de la fortune de Eyadèma qui a régenté le Togo de 1967 à 2005.

Estimée à plusieurs milliards de francs CFA, la fortune de Eyadèma est la source principale de la condamnation de Kpatcha Gnassingbé et ses co-accusés à vingt (20) ans de réclusion. Le désormais ex-député de la Kozah étant le second personnage clé de la fratrie Gnassingbé, il n’hésitait pas à hausser la voix sur le partage de l’héritage de Eyadèma qui serait confisqué par son frère de président Faure Gnassingbé.

Bien qu’ayant réussi à mettre sous éteignoir Kpatcha, Faure doit faire face à la résistance et à la colère noire de certains de ses frères et sœurs tant qu’aucune lumière ne sera faite sur ce que Eyadèma avait laissé à sa mort le 05 février 2005.

Rock, prêt à défendre son droit d’aînesse

Sa déclaration au Palais de Justice de Lomé lors du procès du complot de coup d’Etat en dit long sur le profond malaise au sein des Gnassingbé. « Les problèmes de familles existent réellement au point qu’un jour, nous avons décidé d’empêcher l’avion présidentiel d’atterrir au retour d’un voyage, histoire de pouvoir régler une fois de bon, le problème de partage des biens de la famille. Cela est connu de beaucoup de Généraux et autres officiers de l’armée », a déclaré le Lieutenant-Colonel Rock Gnassingbé.

Il est à ce jour le fils aîné des enfants de Gnassingbé Eyadèma, qui selon le confrère « Tribune d’Afrique » sont au nombre de quatre vingt-six (86). Bien que Kpatcha soit mis « hors d’état de nuire », Rock ne serait pas prêt à lâcher prise. Il serait soutenu par une bonne partie de ses frères pour obliger Faure à leur partager les biens de leur défunt père. Dans sa parution n°0087 du 26 septembre 2011, le magazine « Tribune d’Afrique » révèle que l’officier Rock a été toujours un soutien de Kpatcha dans le partage de la fortune de Eyadèma.

Tout comme Kpatcha, Rock conçoit mal le fait que Faure refuse de déclarer cette fortune. Pour le confrère, Rock menace de prendre « en otage » le Port Autonome de Lomé et réclame avec certains de ses frères 183 milliards d’héritage.

Tout porte à croire que le torchon continuera de brûler aussi longtemps dans la fratrie tant que Faure fera de la fortune de son père sa propriété privée et personnelle.

Au commencement, l’affaire de caveau familial

A la mort de Eyadèma, c’est une famille unie et solidaire derrière Faure pour la succession dynastique à la tête du Togo. Mais très tôt, les clivages, les ressentiments et les réprobations ont apparu. Si les rejetons de Eyadèma ont géré les brouilles en silence, la grande division est apparue en février 2007.

A l’occasion de la fête des morts (le Kigbeleng) en mémoire de Eyadèma, un musée lui a été dédié. Il se rapporte que ce monument qui a coûté 1 milliard 875 millions FCFA selon « Tribune d’Afrique » a été presque financé par Kpatcha ; Faure ne serait pas d’accord avec le projet. Alors que tout était prêt pour la cérémonie de dépôt de gerbes devant la tombe de Eyadèma, Rock et Kpatcha sont portés disparu avec les clés du caveau. Pour toute réponse, l’un de leurs cousins a apporté le message suivant à Faure : « Nous sommes contre ta gestion de l’héritage de notre père, nous pensons que tu n’es plus digne d’accéder à sa tombe », rapporte « Tribune d’Afrique ».

En ce jour anniversaire des deux ans de la disparition de Eyadèma, Faure a dû défoncer le caveau sous les regards médusés de ses convives.

Peu avant cet incident, des liasses d’anciens billets de FCFA estimés à 27 milliards avaient été découverts à Kara. L’argent appartiendrait à Kpatcha et serait oublié par ce dernier. « Kpatcha a tenté plus tard de changer les anciens billets retrouvés [mais] son président de frère a tout mis en œuvre pour que la BCEAO ne cède pas à sa requête. Kpatcha ne le lui pardonnera jamais », rapporte « Tribune d’Afrique » qui ajoute que « pour faire perdre toutes les traces de la fortune de Eyadèma, Faure trouve la formule idéale : sur conseils de l’un de ses banquiers, il privatise l’Union Togolaise de Banque (UTB) et la Banque Togolaise de Développement (BTD), toutes deux utilisées pendant longtemps par Gnassingbé Eyadèma pour ses comptes vautours ».

En ce qui concerne les anciens billets retrouvés, certaines sources informent qu’ils seraient brûlés. Quel gâchis !

Faure otage de sa gourmandise

Il y aurait moins de problème dans la famille présidentielle si Faure accédait à la demande de partage de l’héritage de Eyadèma. Pourquoi Faure qui dispose en plus des privilèges de chef d’Etat rechigne-t-il à libérer les biens de son père ? Difficile d’y répondre mais bon nombres de Togolais estiment que si Faure travaille pour que cette fortune qui n’est autre que le pillage des ressources du pays revienne dans le trésor public, on pourrait bien le comprendre. Mais son attitude n’autorise nullement à croire à cette hypothèse. Il serait dans la logique de confiscation générale de cette fortune. Tout cela pour quoi faire ?

Pour la sauvegarde de l’image du Togo et de Faure lui-même, il doit faire diligence pour accéder à la demande de ses frères.

Autrement, il sera indigne pour celui qui ne peut pas gérer l’héritage de son père, de prétendre diriger tout un pays.

Au demeurant, le feu continue de brûler entre Faure et ses frères.

Kokou AGBEMEBIO
Le Correcteur N° 288 du 30 septembre 2011