Face au refus du pouvoir d’appliquer les recommandations de 2007 et 2010, l’UE boude le Togo et met Faure dos au mur

A la faveur de la reprise de la coopération avec le Togo en novembre 2007, l’Union Européenne a financé les élections législatives de 2007 à hauteur de 2,3 milliards de francs CFA et la présidentielle de 2005 à plus de 8 milliards de nos francs.  Mais la non application des recommandations des deux missions d’observations européennes qui ont supervisé ces élections pourrait conduire à une rupture de confiance entre  l’UE et le Togo.

Selon des sources autorisées,  dans les sphères décisionnelles  de l’institution européenne, une grande majorité militerait pour un boycott pur et simple des législatives et locales qui attendent le Togo cette année 2012.  En début de ce mois, le ministre de l’Administration Territoriale aurait rencontré la délégation de l’UE au Togo pour leur soumettre le budget du gouvernement pour l’organisation des législatives et locales 2012. Et en lieu et place d’une réponse claire, le gouvernement aurait été plutôt convié à opérer des réformes nécessaires à une élection crédible. « L’UE a plusieurs élections à financer cette année et ne prendra en compte que ce qu’elle peut », auraient répondu par ailleurs les diplomates. Néanmoins, les deux experts électoraux, M. Philippe Percier et Mme Teresa  Polora  envoyés par l’Union Européenne et qui ont  séjourné au Togo du 17 au 24 février  permettront à l’institution de déterminer la nature de l’aide à apporter pour l’organisation des élections.  Après leur  rencontre avec  les différents  acteurs impliqués dans ce processus électoral, les deux experts vont dresser à l’UE un rapport sur l’évolution du processus électoral.

Mais ce qui est certain, l’UE a  suspendu le financement de la grande mission d’observation  pour le compte de ces élections. Même si cette position n’est pas un désengagement total,  elle est motivée par le fait que l’UE ne s’engage dans des missions d’observation qu’en ayant suivi le processus. Or, le délai lui  paraît aujourd’hui assez court pour mener un travail efficace et pertinent.

Autres raisons, on avance le retard accusé dans les préparatifs de ces élections notamment, la révision des listes électorales, la résolution des questions liées au découpage électoral, la mise en place des mesures sécuritaires devant garantir la transparence et la sécurisation de la chaîne du vote.

Des problèmes qui devront être réglés si le gouvernement applique à la lettre les recommandations des deux dernières missions d’observation.

De la fourberie et du manque de volonté du pouvoir de Faure

Face à la réticence du pouvoir à opérer les réformes nécessaires à l’organisation des élections transparentes et crédibles, l’UE a appelé plusieurs fois le gouvernement à  entamer des discussions  avec l’opposition.  Au lieu des discussions franches avec une opposition légitime et sérieuse, le gouvernement a pendant longtemps joué au dilatoire en engageant des discussions qui au finish n’ont rien apporté. Du dialogue RPT-UFC au CPDC rénové en passant par le CPDC version Sanvée de Tové, aucune réforme sérieuse n’a été engagée. Et aujourd’hui, à quelques mois des élections législatives, les problèmes sont toujours intacts. C’est seulement le lundi 20 février que l’opposition parlementaire est entrée en discussions avec le gouvernement. Est-ce une manière de flatter les experts électoraux de l’UE qui étaient en mission au Togo ?  Des discussions que malheureusement, les acteurs ont vite fait d’arrêter à cause de la confusion créée par le double rapport de la CNDH sur les allégations de torture sur les détenus dans l’affaire Kpatcha Gnassingbé.

Maintenant que le rapport authentique a été remis au gouvernement, c’est le moment ou jamais pour le gouvernement de rouvrir ces discussions avec la plus grande volonté d’opérer effectivement les réformes nécessaires à l’organisation des élections crédibles. L’apaisement du climat politique et social après ces élections en dépend. Point n’est besoin de le démonter, c’est la présence massive des observateurs de l’UE lors des précédentes élections qui a donné un semblant de crédit à ces élections. Si  aujourd’hui, la présence de cette mission est incertaine lors des élections  à venir, c’est seulement un accord crédible entre le gouvernement et l’opposition parlementaire qui permettra à Faure d’éviter un scrutin au lendemain incertain.

Avec l’expérience de 2005  où la contestation des résultats a débouché sur des violences qui ont fait plus de 500 morts (rapport de l’ONU), Faure va-t-il se hasarder à contourner les réformes pour organiser des élections sans le soutien du CAR et de l’ANC ?

Olivier GLAKPE

Le Correcteur N° 324 du 27 février 2012