Grincements de dents, amertume et indifférence qui consacrent la grande division au sein de la famille
La dissolution du Rassemblement du Peuple Togolais (RPT) bien que annoncée depuis des mois avait été perçue par bon nombre des caciques du régime comme une mission impossible. La décision du Congrès de Blitta le 14 avril 2012 a été une grande surprise aussi bien pour certains barons que les enfants de Eyadéma Gnassingbé. A en croire le confrère « La Lettre du Continent », des barons comme Vouley-Frititi Agbenyigan, Esso Solitoki ou Fambaré Ouatara Natchaba se seraient opposés à la disparition du RPT jusqu’au bout.
Depuis la mort de Eyadéma en 2005, le pouvoir est détenu par deux entités majeures : le RPT et la fratrie Gnassingbé. En d’autre terme, les grandes décisions dans la régence du Togo se prennent à ces deux niveaux.
Naturellement, Gnassingbé Faure dont le souci majeur est d’être le seul capitaine à bord, s’est engagé à neutraliser sa famille politique et biologique. La dissolution du RPT est l’ultime étape pour s’affranchir de sa dépendance vis-à-vis du RPT et de la famille Gnassingbé.
Pour avoir une idée de la réaction des plus visibles enfants de Eyadèma au lendemain de la mort du RPT, nous avons mené une enquête exclusive autour de Rock, Kpatcha, Toï, Mey, Essolizam et Emmanuel Gnassingbé. Notre enquête se justifie par le fait qu’à Blitta, aucun enfant de Eyadèma n’était présent à l’exception de Mey. Or, de par le passé, des événements de ce genre mobilisent la fratrie avec des contributions de toutes sortes.
Tout d’abord, il se rapporte qu’aucune réunion de famille n’a été faite dans le sens de la dissolution du parti créé par Eyadèma en 1969. Naturellement, la plupart des enfants de Eyadèma ont appris à travers les médias l’ensevelissement du RPT, le symbole du règne des Gnassingbé sur le Togo.
Dans l’entourage de Rock Gnassingbé, il se raconte qu’il aurait regretté que Faure n’ait pas réuni la famille pour discuter d’un sujet aussi sensible. Par conséquent, cet événement contribue à diviser davantage la famille. Par ailleurs, Faure serait toujours dans la logique de la confiscation des biens de la famille comme Rock a eu à le souligner lors du procès de Kpatcha en septembre 2011.
Après avoir été débarqué du Régiment des Blindés et du Port Autonome de Lomé, Rock se consacre pour l’heure à ses études à Kara en vue de l’obtention de son grade de colonel.
Depuis sa cellule, Kpatcha aurait accueilli la nouvelle avec un grand sourire. « Pour l’honorable Kpatcha, la dissolution du RPT n’est pas une surprise. Il savait que Faure veut dominer tout le monde et c’est pour cela que lui Kpatcha a été mis en prison », a déclaré un proche de l’ancien député de la Kozah. Quant à son frère jumeau Toï, il aurait accueilli la nouvelle dans l’indifférence totale. Plusieurs de ses proches ont révélé qu’après les chaudes altercations entre lui et Faure dans les premières heures de l’arrestation de Kpatcha, Toï ne s’intéresserait plus à ce que fait Faure. Sa principale préoccupation est le Conseil National des Chargeurs du Togo (CNCT) qu’il dirige et ses propres affaires.
En ce qui concerne Essolizam, il se rapporte qu’il a été traumatisé par ses années d’incarcération de sorte qu’il ne voudrait plus rien entendre ni de la famille ni du pouvoir.
Il préférerait relancer ses affaires foutues par ses deux ans d’arrestation.
Déjà candidat indépendant à Sotouboua lors des législatives de 2007, la création d’UNIR à la place du RPT n’est pas le problème d’Emmanuel Gnassingbé. A propos de Mey, le seul fils de Eyadèma ayant pris part au Congrès de Blitta, il est lié à Faure et l’accompagne dans ses activités.
Cependant, Mey depuis quelque temps, est moins visible dans ses actions avec son association Jeunesse en Mouvement. En de pareille situation, il initie souvent des activités pour louanger les actions de son frère. Doit-on dire que ce n’est plus le grand amour aussi entre les deux rejetons de Eyadèma ?
Il ressort de cette enquête que la dissolution du RPT vient renforcer la grande division entre les Gnassingbé. Le RPT et le pouvoir étant perçus comme un héritage, chacun des enfants luttaient pour les sauvegarder. Mais la création de UNIR apparaît comme une initiative personnelle de Faure et exclut de facto les autres enfants dans leur engagement.
La mission de réconciliation entre Faure et ses frères préconisée par Kpatcha devant la Commission Vérité Justice et Réconciliation sera donc difficile. En définitive, lorsqu’un chef d’Etat n’est pas capable d’unir sa propre famille, c’est bien dommage qu’il entend UNIR tout un peuple.
Kokou AGBEMEBIO
Le Correcteur N°343