Contestations tous azimuts du pouvoir de Faure : le début de la fin ?

Décidément, le ciel est en  « dérangement » en cette fin d’année  pour Faure Gnassingbé. Habitué à se jouer de tout le monde depuis son arrivée au pouvoir et à se la couler douce en Italie loin de la misère ambiante des Togolais, il doit désormais se  sédentariser pour faire face à une contestation ouverte de son pouvoir sous le couvert d’une crise estudiantine.

Tout est parti de la ville de Kara considérée à tort ou à raison comme le fief ou la base arrière du pouvoir RPT. Ce qui au départ était considéré comme une crise estudiantine s’est rapidement mué en une contestation ouverte et violente du pouvoir, avec en toile de fond la destruction  de tous les symboles du système à savoir le siège du RPT, les casses des véhicules administratifs, la mise à sac des maisons luxueuses des barons du régime.

Très vite, ce mouvement de contestation d’une rare violence s’est généralisé dans l’ensemble du pays et a pris la semaine dernière des proportions assez inquiétantes avec les manifestations de rues des élèves. De Dapaong à Bafilo, de Sokodé à Vogan et de Kara à Sotouboua, le pays était en une situation de quasi insurrection, même si le très toxique « republicoftogo.com », champion de la désinformation conteste ce qui est une évidence pour tout le monde. Pour Faure Gnassingbé, l’année se termine mal, très mal et 2012 risque de commencer de la même manière, c’est-à-dire sur la contestation, tant le gouvernement peine à apporter des solutions durables aux revendications des grévistes.

Le Prince Gnassingbé accroché vaille que vaille au pouvoir pour le meilleur et pour le pire ne comprend  pas les causes qui sous-tendent cette contestation généralisée. Alors comme un naufragé qui cherche une bouée de sauvetage, il multiplie les solutions hasardeuses par le truchement des ministres arrogants et gaffeurs dont les déclarations provoquent la colère des manifestants plutôt que de les calmer. La conséquence est le durcissement du ton des étudiants qui  fustigent les manœuvres de division du gouvernement agrémentées par une forte dose de tribalisme, comme d’habitude. Il y en a comme ceux de Kara qui vont au-delà des revendications estudiantines  et exigent carrément le départ du pouvoir de Faure Gnassingbé.

Il est désormais évident que cette série de contestations généralisées trouve ses origines dans le refus de l’alternance, et surtout la saturation du pouvoir qui se vit aussi bien dans l’opposition qu’au sein même du sérail. Le principe qui veut que dans le système RPT seul le chef est dans la durée et que les serviteurs sont des fusibles, a commencé par lasser ceux qui dans le sérail nourrissent aussi des ambitions. Et c’est à ce niveau que les choses semblent se compliquer pour le Prince Gnassingbé qui doit compter actuellement au bout des doigts ceux qui lui sont fidèles tant dans sa famille biologique, politique, ses amis que dans sa localité d’origine. Le comble dans cette histoire est que ce sont les supposées mains noires qui seraient à l’origine de la contestation, si on s’en tient à une certaine version,  qu’on envoie sur le terrain pour éteindre le feu. Un véritable paradoxe symptomatique d’un chef qui éprouve toutes les difficultés à trouver des hommes de confiance pour défendre sa cause et sauver son pouvoir. Le problème étant désormais général avec des mobiles politiques, c’est en quatre que Faure Gnassingbé devra se plier pour apporter des réponses particulièrement politiques. Pour l’instant la colère, mieux, la fureur des manifestants qui se sont attaqués à des résidences des pontes du pouvoir commence à donner des idées à certains.

Les barons organisent l’évasion de leurs richesses       

La mise à sac des résidences privées à Kara et ailleurs inquiète sérieusement. Selon certaines indiscrétions, des barons et non des moindres commencent par organiser l’évasion de leurs richesses vers l’extérieur. Il est de notoriété publique que les voleurs de la République qui écument impunément l’entourage de Faure Gnassingbé et font preuve d’une arrogance inouïe ne gardent jamais leur fortune et bijoux dans les banques, mais bien à la maison. Le cas des sous et autres bijoux emportés par les assaillants lors de l’attaque du domicile de Kpatcha Gnassingbé est édifiant. Alors pour éviter toute surprise désagréable, certains pontes du régime commencent par prendre de sérieuses précautions et cherchent aussi à obtenir des visas permanents pour leurs familles et proches. Au sein du pouvoir, certains sont convaincus que 2012 ne s’annonce pas sous les meilleures auspices pour Faure Gnassingbé de plus en plus isolé dans son propre camp. Le pire pourrait surgir à tout moment, alors il faut prendre des mesures pour ne pas se faire surprendre. Même les maîtresses et autres copines disséminées à travers les résidences luxueuses  dans les quartiers de Lomé se font de plus en plus discrètes. Le vent est-il définitivement en train de tourner ? Il est trop tôt pour le certifier, mais une chose est sûre, le verrou de la peur du soldat a définitivement sauté même chez les jeunes élèves.

La théorie du troisième larron.

La vague de contestations  violentes de ces derniers jours qui est partie du supposé fief du pouvoir et qui s’est généralisée par la suite permet de comprendre à quel degré les Togolais toutes ethnies confondues veulent le départ du système RPT. De ce fait la volonté de Faure de se maintenir au-delà de 2015 apparaît comme la provocation de trop. De plus Faure Gnassingbé est complètement perdu dans un système sclérosé qui ne cesse de montrer chaque jour ses limites. Les leaders politiques qui devraient faire l’affaire se sont fourvoyés. Ceux qui bénéficient actuellement de la confiance des populations peinent à se mettre dans les costumes d’hommes d’Etat capables d’assurer non seulement une alternance mais surtout une alternative crédible. Dans les milieux diplomatiques d’où on suit particulièrement l’évolution de la situation, on est convaincu qu’aucun régime démocratique ne peut succéder immédiatement à une dictature de plus de 40 ans. Il faudra nécessairement une transition capable d’être pilotée par un homme de poigne pour remettre de l’ordre dans tout le pays. « La situation de conflit en Côte d’Ivoire poussait la communauté internationale surtout la France à être indulgente vis-à-vis du pouvoir de Faure Gnassingbé. Maintenant que les choses semblent se normaliser en Côte d’Ivoire, les choses seront plus compliquées pour le pouvoir de Lomé surtout que l’on craint le refus dont le Togo fait preuve depuis 1990 serve d’exemple pour d’autres pays de la région », nous confiait récemment à Paris un diplomate français sous couvert de l’anonymat.

De plus, les activités hautement criminelles dans lesquelles le pouvoir des Gnassingbé est impliqué comme c’est le cas actuellement du Hezbollah compliquent la situation de Faure. Vu de l’Hexagone, le Prince Gnassingbé n’a jamais eu la côte auprès du Président français Nicolas Sarkozy. La preuve, depuis la concession à la hussarde du Port Autonome de Lomé à Vincent Bolloré, l’ami de Sarkozy, ce dernier rechigne à recevoir en audience son homologue togolais qui multiplie les lobbyings à cet effet. Selon un observateur de la scène politique africaine et française, « Que ce soit Sarkozy ou Hollande qui gagne la prochaine présidentielle en France, Faure Gnassingbé le président togolais aura des soucis à se faire. » Voilà qui est dit. L’idée du troisième larron faisant sérieusement son chemin dans certaines officines où la situation est jugée préoccupante, les choses risquent de s’accélérer dans les jours ou mois à venir, à moins que Faure lui-même décide d’anticiper en annonçant publiquement son retrait du pouvoir pour 2015.

Ferdi-Nando

www.lalternative-togo.com