Kidnapping, vol et expulsion illégale de Méhanna Houssam
Atcha Titikpina et Massina Yotroféi sont condamnés par la cour suprême.
Lorsque dans un Etat, les institutions se métamorphosent en des ” états dans un Etat”, la vie devient insupportable, non seulement pour les citoyens mais aussi pour tous ceux qui viennent ou partent. C’est la réalité frappante qui vient encore une fois d’être mise au grand jour par la Cour suprême qui a dit le droit dans une affaire qui est plutôt une habitude quotidienne chez les personnes concernées. Mohamed Atcha Titikpina, aujourd’hui Chef d’Etat major des Forces Armées Togolaises et le Colonel Massina Yotroféi, l’homme dont on ne cessera de parler assez. Ces deux hommes se sont rendus coupables dans le kidnapping, le vol et l’expulsion illégale d’un libanais. L’affaire portée devant la Chambre administrative de la cour suprême déboute le ministère de la Sécurité et l’ANR qui ont mené l’opération en toute illégalité. Reste seulement à ce que les fonds soient restitués à leurs propriétaires.
La Chambre administrative de la Cour suprême rétablit le libanais Mehanna HOUSSAM dans ses droits en prononçant l’illégalité de l’expulsion du commerçant libanais et le retrait de son titre de séjour. Ces décisions prises à l’encontre du commerçant à qui l’ANR en complicité avec le ministère de la sécurité dirigée à l’époque par Atcha Titikpina sont purement et simplement illégales.
Les faits dans le contexte historique
Les faits remontent à cet après midi du dimanche 15 mars 2009, il y a donc plus de deux ans où le commerçant ressortissant libanais Mehanna HOUSSAM, employé de la société Marco SARL a été enlevé par les éléments de l’ANR. L’homme était tranquillement à bord de son véhicule 4 X4 TG 7793 AG cet après midi à 15 heures, conduit par son chauffeur du nom de Anifrani Alexis. Ils venaient de faire un aller retour Lomé Cotonou Lomé.
C’est en rentrant sur le territoire togolais en provenance du Bénin qu’ils sont tombés dans le guet apens de l’ANR, une, opération dirigée par le redoutable Lieutenant Pali qui a conduit directement les deux hommes dans les locaux de la tristement célèbre Agence nationale de Renseignements.
D’après le journal Combat du Peuple qui a relaté avec détail dans son N° 645 du 27 mars 2009 la rocambolesque sotie de l’ANR, le parcours Sanvee Kondji vers ANR a été un enfer : ” la menotte qu’on lui a passée aux poignets a été délibérément serrée au plus près pour faire mal. Les injures et les menaces pleuvaient. Chaque fois que le sieur Houssam fait allusion à ses droits, le lieutenant lui répondait : je m’en fous….. une fois au siège de leur service, le sieur Houssam a été soumis à des harcèlements de tous genres. On lui demandait inlassablement quels sont ses liens ou relations avec le nommé Chmeissani Toufic Hamad, également libanais, à qui il avait été déjà arraché de l’argent, soit 595 000 dollars doublée de la bagatelle de 680 000 dollars pour Baaklini Farès un autre frère libanais. ”
Toutes ces manœuvres curieusement se déroulaient en toute illégalité et en toute impunité. Puisque, les sommes extorquées au libanais en question ne relevaient ni du blanchiment d’argent ni de trafic de drogue comme établis par les services incriminés. Le procès verbal a explicitement présenté les faits en confirmant que le sieur Houssam s’était présenté à l’office central de répression du Trafic illicite des Drogues et du blanchiment pour déclarer que c’est lui qui a confié à son compatriote Baaklini Farès la somme de 595.000 dollars.
Dans la foulée, toutes ces sommes ont été régulièrement déclarées aux services compétents mais ont été interceptées et convoyées à des destinations inconnues. Pour avoir insisté à entrer en possession de ces sommes, le sieur Houssam et son chauffeur sont passés à la méthode forte reconnue à l’ANR : la torture. La première nuit, ils l’ont passée en plein air sous la garde des quatre éléments de l’ANR qui avaient braqué leurs armes sur eux. Le lendemain, un lundi, s’en sont suivies les autres formes de torture, morale et psychologique.
Le mardi, c’est à 5 heures du matin que le prévenu Houssam a été réveillé et conduit manu militari à la frontière de Sanvee Kondji pour être expulsé sans aucune forme de procès. Son titre de séjour était arraché. Ceci sur arrêté du Ministre de la Sécurité de l’époque, Mohamed Atcha Titikpina. L’argent, 1. 275 000 dollars n’aura pas été restitué. Les victimes, sachant qu’ils opèrent en toute légalité ont saisi le procureur de la République avec un conseil d’avocats. Le patron de l’ANR, qui estime être au dessus de tous, même de la justice n’a pas digéré le fait que le procureur ait libéré les sieurs Chmeissani et Baaklini pour la raison qu’ils aient déclaré régulièrement les sommes transportées à la douane et que des récépissés leur ont été délivrés. Cette affaire contribuera au départ dans les conditions humiliantes de Robert Baoubadi Bakai, ancien Procureur de la République qui est largué aujourd’hui et mis à la disposition de la fonction publique.
La cour suprême déboute les deux forfaitaires
La cour suprême d’Abalo Pétchélébia a constaté beaucoup d’irrégularités, d’illégalité et d’arbitraire dans cette affaire qui inculpe donc l’Agence Nationale des Renseignements et le Ministère de la Sécurité. Le duo magique Titikpina et Massina sont passés maîtres dans ces méthodes illégales pour dépouiller les hommes d’affaires de leurs fortunes et de leurs capitaux. La méthode est simple. Ayant mis sur écoute la plupart des personnes qui circulent sur le territoire national, lorsqu’ils apprennent qu’une certaine somme ou un bien a été déclaré et devrait traverser les frontières, ils dressent une embuscade pour arracher ces biens à ces personnes pour ensuite les expulser. C’est dans le meilleur des cas. Dans le pire des cas, ces personnes sont torturées, parfois à mort ou disparaissent définitivement sans aucune trace d’après des confidences.
L’affaire du Libanais Houssam a résisté à la manœuvre habituelle des compagnons de fortune qui se sont suffisamment enrichis avec ce trafic pour le simple fait que dans la foulée, les affaires des Libanais qu’ils viennent de dépouiller et d’expulser ont des ramifications avec certains services Russes proches du Premier ministre Vladmir Poutine. Celui-ci aurait mis la pression sur les autorités togolaises de restituer les sommes illégalement grugées aux hommes d’affaires libanais. C’est ce qui a motivé donc la décision favorable de la Cour suprême. Dans la plupart des cas, d’après des confidences, l’argent volé est divisé en trois parties, une partie pour L’ANR, une pour le ministre de la sécurité et la dernière partie vers une destination inconnue. Là, rien ne peut prouver que c’est comme cela que l’opération est menée, mais toujours est-il que l’arbitraire et l’illégalité marquent ces manœuvres.
Le greffe du tribunal a notifié la décision de la Cour Suprême aux concernés déjà le lundi 22 aout dernier aux institutions concernées. Le Colonel Massina Yotroféi aurait été déjà informée par notification, de même que le ministère de la sécurité qui a un nouveau patron en la personne de Gnama Latta, ainsi que la Direction Générale de la Documentation qui devrait restituer ou renouveler le titre de séjour au sieur Houssam Mehanna.
Après la notification de cette condamnation, le plus dur commence pour les autorités togolaises : la restitution des fonds aux propriétaires et cela devrait faire l’objet d’une nouvelle procédure.
Les uns pensent que l’argent a été dilapidé entre trois larrons, d’autres estiment qu’il a été déposé au trésor et d’autres encore trouvent les traces de cette somme au CENTIF.
L’affaire Houssam Mehanna n’est qu’une illustration de l’arbitraire et de l’illégalité qui règnent à l’ANR et au Ministère de la sécurité.
On se rappelle, il y a presque un an, des commerçants se sont vus dépouillés par la même agence de renseignements la somme de 9 milliards de FCFA à l’aéroport de Lomé. Malgré la justification de la provenance et de la destination légales de cette somme, 80 millions ont été retranchés sans motif. Le ministre de la Justice à l’époque qui avait béni cette situation de non- droit était Kokou Tozoun.
Plusieurs autres citoyens togolais ou expatriés vivent quotidiennement ces situations d’illégalité. Ce qui affecte dangereusement la stabilité économique du Togo. Les investisseurs et autres commerçants, en apprenant ces informations ne sont pas encouragés à investir dans le pays.
Le Libanais Houssam gère aujourd’hui au Bénin des dizaines de parcs automobiles et brasse d’après les informations plus de trois milliards de Fcfa par mois ; un manque à gagner non négligeable pour une économie togolaise souffrante.
La sortie ” positive ” de la Cour suprême pourrait rassurer, si et seulement si la procédure se poursuit pour que les propriétaires entrent en possession de leurs fonds.
Pour ce qui concerne les deux complices, Atcha Titikpina et Yotroféi Massina qui se regardent aujourd’hui en chiens de faïence, le Chef de l’Etat qui est le premier magistrat saura décider de leur sort face à ce que le confrère du Combat du peuple a désigné par des ” symboles de gangstérisme d’Etat “.
Carlos KETOHOU
L’Indépendant Express N°179 du 30 août 2011