Affaire de tortures au Togo, intimidations, menaces, dilatoires etc…

Les confrontations dans l’affaire de tortures sur les détenus du dosssier Kpatcha Gnassingbé  ont démarré au siège de la Commission nationale des Droits de l’Homme (CNDH) à Lomé. « Bourreaux » et « victimes » sont confrontés depuis jeudi dernier  dans les locaux de la CNDH, en présence du président de ladite commission Kofi Kounté, et aussi de plusieurs éléments de la Gendarmerie nationale pour assurer la « sécurité » et éviter des « violences » entre les différentes parties.

Tout a commencé le jeudi  à onze heures. La confrontation était censée démarrer à 8 heures du matin, mais les officiers mis en cause ne se sont présentés trois heures de temps après, soit à onze heures. Ils étaient trois officiers de l’ANR à se présenter ce jeudi matin : le Cdt Kulo, le Cne Kadanga (à ne pas confondre avec le Col Kadanga, Chef Corps de la FIR) et le Cne Pali (à ne pas confondre non plus avec le Sergent Chef du même nom qui fait plutôt partie des victimes). Plus tard, le nombre variera en fonction des personnes mises en cause ou des témoins nécessaires cités.

Jusqu’à hier matin, le Capitaine Adjinon Lambert, l’adjudant-Chef Seydou, Kassiki Esso, Baouna, Laré Nayo, Gnassingbé Bagoubadi, Moussa, Kamouki, ont été confrontés a ceux qu’ils accusent de « tortures ».

Selon les indiscrétions, sans surprise, les accusés ont nié tout en bloc. Certains parmi eux ont même nié avoir vu ces personnes à l’ANR, pendant que les victimes les accusent directement de pratiques de tortures, avec des dates précises. Les informations parvenues à la Rédaction de L’Alternative indiquent que certains officiers citent des témoins qui, convoqués, ne se reconnaissent parfois pas dans les propos desdits officiers.

On apprend que les « bourreaux » continuent de menacer leurs « victimes » en présence du président de la CNDH. Par exemple, on cite le cas du Cne Kadanga qui aurait dit à l’un des ses accusateurs : «  Ta croix n’est pas encore terminée ! ». Le Cne Pali, lui, indique qu’il va porter plainte contre son accusateur pour  « menace de mort ». Dilatoire ou sérieuse inquiétude ?

Les avocats des victimes avaient demandé la démission des présumés auteurs de tortures avant toute confrontation. Ils estimaient qu’à leurs postes, les « bourreaux » pouvaient continuer d’inquiéter leurs clients, puisque disposant toujours des capacités de nuisance.  L’Exécutif n’a pas jugé bon de les démettre avant le début des confrontations. Au contraire, on apprend qu’ils auraient été reçus par le Chef de l’Etat pour des discussions secrètes. Avec les premières informations captées dans les coulisses des confrontations, on peut aisément imaginer que la rencontre avec le Chef n’a inspiré aucune bonne conduite à ces officiers qui continuent de narguer le monde et de faire peser les menaces de tortures sur le citoyen lambda.

Jusqu’à récemment, les noms de bourreaux connus dans la masse populaire se limitaient à Massina, Kulo, Kadanga, Pali. Mais il faudra désormais ajouter les sieurs Essobiyou, Adji, militaires de rang, « agents d’exécution ». Ils sont tous d’eux à l’ANR et auraient été également cités lors des confrontations.

Le Togo étant devenu un pays où dès que la tête d’un citoyen ne plaît plus à un des nombreux « Seigneurs de la République », le pauvre est accusé de « coup d’Etat », enlevé, torturé et parfois même exécuté par des « forces invisibles » ou des « éléments incontrôlés »,  les déballages lors du procès dans l’affaire Kpatcha Gnassingbé ont permis de savoir que des exécutions sommaires continuent de se pratiquer dans notre pays, par des éléments en uniformes. Et chaque jour que le bon Dieu fait, on découvre que l’ANR ne détient pas que ceux qu’on peut qualifier de « détenus sensibles ». Les cas des militants de l’ Obuts, du sous-officier Akakpo, et du sieur Caris ne sont que trop édifiants en la matière.

Une chose est tout de même réconfortante, des gens à la réputation sulfureuse, on en a aussi connu sous d’autres cieux. Mais depuis peu, la nature se débarrasse d’eux progressivement. Le Cne Séka Séka en Côte d’Ivoire et le fameux Abdallah Senoussi en Libye ont certainement été bourreaux tout le temps. Mais il est arrivé un moment où ils doivent faire face à leur passé, répondre de leurs actes. La roue de l’histoire tourne et le moment où tous les bourreaux du peuple se présenteront devant une justice « indépendante » pour répondre de leurs actes peut ne plus être loin.

 

Mensah K.

L’Alternative  N°106 du 29 novembre 2011